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Canadian Public Health Association

Lettre ouverte au ministre de la Santé du Nouveau-Brunswick

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Le 12 octobre 2017

L’honorable Benoît Bourque
Ministre de la Santé
Place HSBC, 5e étage
C.P. 5100
Fredericton (Nouveau-Brunswick)
E3B 5G8

Monsieur le Ministre,

Félicitations pour votre nomination au poste de ministre de la Santé du Nouveau-Brunswick. Nous vous souhaitons plein succès dans la gestion de ce portefeuille complexe et diversifié. Nous vous écrivons pour exprimer nos motifs de préoccupation et pour vous présenter notre point de vue sur l’un de ces dossiers complexes : la réorganisation du Bureau du médecin-hygiéniste en chef.

Le 31 août dernier, votre prédécesseur a annoncé la réorganisation de ce Bureau en vue d’une meilleure harmonisation de l’expertise gouvernementale, en signalant que ces changements n’occasionneraient aucune mise à pied. Nous reconnaissons le pouvoir des provinces de s’organiser comme bon leur semble pour respecter leurs obligations en vertu des lois actuelles et futures et pour faire un usage responsable des ressources dont elles disposent. Nous craignons cependant que les changements proposés ne nuisent à la capacité du Nouveau-Brunswick de respecter les obligations directes du programme de santé publique et de répondre aux attentes de la population.

Nous déplorons en particulier l’intégration de la Direction de la pratique en santé publique et de la santé de la population au ministère du Développement social. Selon nous, cette intégration ne permettra plus au médecin-hygiéniste en chef de mener certaines activités de prévention et de promotion qui donnent des résultats exceptionnels à long terme et qui appuient la résilience de la société. Elle complique aussi l’accès à ces ressources de santé publique quand elles deviennent nécessaires en cas d’éclosion. Par exemple, durant la dernière éclosion de grippe H1N1, la capacité des fonctionnaires de cette Direction de gérer l’imprévu s’est avérée inestimable pour orchestrer une intervention appropriée.

Nous avons vu les résultats d’un système de santé publique mal organisé pour faire face à un tel épisode durant notre intervention collective face à l’éclosion du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) en 2002. Il y a eu 438 cas de SRAS au Canada, dont 44 décès imputés à ce syndrome; les cas étaient concentrés en grande partie à Toronto et dans la région du Grand Toronto (Naylor, 2004). Ce fut le plus grand nombre de cas recensés de tous les pays hors de l’Asie, et l’éclosion a réduit le produit intérieur brut du Canada de 1,5 milliard de dollars (Darby, 2003). Les répercussions économiques ont perduré pendant plus d’un an. Cette éclosion relativement limitée a aussi eu de profondes répercussions sur le système de santé publique canadien, ce qui a donné lieu à la création de l’Agence de la santé publique du Canada. Le rapport du Comité consultatif national sur le SRAS et la santé publique a réclamé des efforts pour aborder les défaillances du système, à savoir :

  • L’absence de capacité d’appoint dans les systèmes de santé clinique et de santé publique;
  • La difficulté d’accéder en temps opportun aux épreuves de laboratoire et à leurs résultats;
  • L’absence de protocoles de partage de données ou d’information entre les gouvernements;
  • Les incertitudes quant à la propriété des données;
  • L’insuffisance de la capacité de mener des enquêtes épidémiologiques sur l’éclosion;
  • L’absence de procédés administratifs coordonnés entre les établissements et les sphères de compétence pour assurer la gestion de l’éclosion et l’intervention d’urgence;
  • Les lacunes dans les protocoles des établissements de santé en matière de gestion des éclosions, de contrôle des infections et de surveillance des maladies infectieuses;
  • La faiblesse des liens entre le système de santé publique et le système de services de santé personnelle. (Naylor, 2004)

Malgré l’application de nombreuses recommandations du Rapport Naylor de 2004, ces problèmes persistent aujourd’hui et pourraient être exacerbés par la réorganisation proposée du système de santé publique du Nouveau-Brunswick. Il faut mettre en œuvre des stratégies organisationnelles et des processus administratifs adéquats pour favoriser les communications et la coopération entre les éléments de ce système. Il faut aussi des indicateurs de résultats et d’efficacité clairs pour mesurer l’efficacité du système sur le plan de la santé des populations et sur le plan opérationnel. Pour répondre à ces craintes, nous recommandons vivement à la province du Nouveau-Brunswick d’interrompre ses efforts de réorganisation et de songer sérieusement à appliquer les recommandations suivantes pour maintenir l’efficacité actuelle du système de santé publique et pour fournir des preuves à l’appui d’améliorations aux programmes qui renforceront la santé des Néo-Brunswickois :

  • Mettre en œuvre des processus de partage des données et de l’information et favoriser les communications entre les structures nouvellement réharmonisées du Nouveau-Brunswick, et harmoniser les activités opérationnelles afin de maintenir ou d’améliorer les niveaux d’efficacité actuels;
  • Établir une mission, une vision et un objectif clairs et acceptés pour orienter l’efficacité du système de santé publique, et prévoir des résultats clairs sur le plan de la santé des populations et sur le plan opérationnel;
  • Appuyer ces initiatives sur un système robuste de mesure de l’efficacité;
  • Examiner les bases législatives et politiques existantes de la santé publique pour établir et renforcer la concomitance entre ces bases et le cadre actuel des programmes et activités de santé publique.

Nous craignons que les changements annoncés à l’organisation du Bureau du médecin-hygiéniste en chef n’entraînent une baisse du niveau et de l’efficience des services fournis aux citoyens du Nouveau-Brunswick, car les données probantes à l’appui de ces changements organisationnels sont insuffisantes. L’application des recommandations susmentionnées permettra de maintenir l’efficacité actuelle du système de santé publique et de fournir des preuves à l’appui d’améliorations aux programmes qui renforceront la santé des Néo-Brunswickois.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’assurance de notre très haute considération.
 

Suzanne Jackson
Présidente
Association canadienne de santé publique

Marjorie Allison-Ross
Secrétaire
Association pour la santé publique du Nouveau-Brunswick/île-du-Prince-Édouard de l’ACSP 

Association pour la santé publique de la Nouvelle-Écosse

Lilianne Bertrand
Présidente
Association pour la santé publique du Québec

Wanda Martin
Présidente
Association pour la santé publique de Saskatchewan

Lindsay McLaren
Présidente
Association pour la santé publique de l’Alberta

Gord Miller
Président
Association pour la santé publique de la Colombie-Britannique

Cheryl Case
Présidente
Association pour la santé publique des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut