Déclaration de l’Association canadienne de santé publique à l’occasion de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation de 2022
L’Association canadienne de santé publique (ACSP) reconnaît que le processus de vérité et de réconciliation est continu et évolutif, et que toute interaction entre les peuples autochtones (Premières Nations, Inuits et Métis) et les non-autochtones est une occasion de faire progresser la vérité et la réconciliation. L’ACSP s’engage à intégrer concrètement la vérité et la réconciliation dans son travail et s’efforce d’avoir avec les peuples autochtones des relations solides fondées sur le respect mutuel, la confiance et le dialogue. Elle est sincèrement déterminée à repérer et à supprimer de ses structures et de son travail les politiques, procédures et pratiques coloniales, oppressives et racistes.
Certaines vérités doivent absolument être dites. Le colonialisme et le racisme ont réprimé, blessé et raccourci la vie des peuples autochtones. Tant que nous n’admettons pas franchement les effets destructeurs, durables et persistants du racisme colonial, nous ne pouvons pas espérer nous réconcilier avec les peuples autochtones.
Pour permettre aux peuples autochtones de guérir, nous, les non-autochtones et les gouvernements, devons reconnaître les torts que cause encore le racisme colonial et prouver que nous avons changé nos comportements.
En cette Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, la guérison est d’une importance particulière pour la Nation crie de James Smith en Saskatchewan, dont les membres composent avec la violence éprouvée plus tôt ce mois-ci. Cette tragédie évitable est le résultat direct des politiques coloniales racistes des gouvernements actuels et antérieurs. Ces mêmes politiques font quotidiennement violence aux peuples autochtones de tout le pays. Nos pensées et nos prières accompagnent la Nation crie de James Smith, mais elles ne signifient rien si nous ne joignons pas le geste à la parole.
Dans ses entretiens avec la Fondation Thunderbird Partnership, l’ACSP a pris conscience de la crise qui menace deux programmes de lutte contre les toxicomanies spécifiquement axés sur les personnes autochtones et financés par le gouvernement fédéral : le Programme national de lutte contre l’abus de l’alcool et des drogues chez les Autochtones (PNLAADA) et le Programme national de lutte contre l’abus de solvants chez les jeunes (le PNLASJ). Au fil des ans, les répercussions multigénérationnelles durables des traumatismes intergénérationnels causés par le colonialisme systémique institué au Canada (p. ex. les pensionnats et externats autochtones, les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, la violence dans le système de protection de la jeunesse) ont accru la pression sur les effectifs du PNLAADA et du PNLASJ. La perte continue de territoire, les pertes culturelles et linguistiques, la tristesse, les traumatismes chroniques, l’assimilation forcée, la marginalisation et les politiques racistes ont des liens directs avec les maladies mentales et l’usage de substances chez les Premiers Peuples, ce qui en retour exacerbe le stress et les traumatismes.
Malgré les forces inhérentes du PNLAADA et du PNLASJ, dont leur offre de services culturellement appropriés, ces deux programmes ont beaucoup de mal à recruter et à conserver du personnel. La charge de travail est accablante, les conditions de travail sont stressantes, et les salaires sont inférieurs à ceux d’emplois similaires ailleurs au pays. Ces obstacles sont ancrés dans la formule de financement désuète utilisée par le gouvernement fédéral, qui sous-estime grossièrement les ressources requises pour offrir efficacement les programmes. Il est donc impossible de conserver une main-d’œuvre hautement qualifiée, d’investir suffisamment de capitaux et de s’acquitter des dépenses de fonctionnement pour les équipements collectifs de base, ce qui a aussi des effets considérables sur les conditions de travail et exacerbe le problème. Le niveau de financement des programmes par le gouvernement fédéral n’a pas suivi l’évolution de sa propre position face à la réconciliation au cours des 30 dernières années.
En cette deuxième Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, l’Association canadienne de santé publique invite l’honorable Patty Hajdu, ministre des Services aux Autochtones Canada, et l’honorable Marc Miller, ministre des Relations Couronne-Autochtones, à collaborer avec la Fondation Thunderbird Partnership à renforcer les programmes de lutte contre les toxicomanies sensibles aux traumatismes et culturellement appropriés dirigés par les peuples autochtones et à accroître leurs engagements financiers continus. Dans l’esprit de la vérité et de la réconciliation, le gouvernement fédéral doit jouer un rôle de coordination pour assurer la clarté des compétences respectives du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et territoriaux et des gouvernements des Premières Nations à l’endroit de la santé publique de proximité, des soins primaires et des services médicaux de lutte contre les toxicomanies.
L’ACSP applaudit l’exemplarité des communautés et des collectifs autochtones qui travaillent à favoriser la guérison sur tout le territoire que l’on appelle aujourd’hui le Canada. L’Association reconnaît en particulier le travail de l’Assemblée des Premières nations, d’Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis.
- Le Programme de transformation de la santé des Premières Nations de l’Assemblée des Premières nations présente 85 recommandations au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux et territoriaux. Celles-ci couvrent un vaste éventail de secteurs de dépenses, qui visent tous à stabiliser les programmes de santé cruellement sous-financés et à accroître l’autodétermination des Premières Nations, conformément à leurs droits inhérents, internationaux et conférés par traités.
- Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) considère la santé des Inuits dans une optique holistique et croit fermement que d’importantes améliorations peuvent être apportées en ciblant les conditions socioéconomiques actuelles dans les communautés inuites. ITK joue un rôle pivot dans l’appui à ces démarches et travaille à l’élaboration de politiques et d’initiatives propres aux Inuits qui améliorent les conditions sanitaires dans l’Inuit Nunangat.
- La Nation métisse s’affaire activement à la santé et au mieux-être individuel et collectif des Métis au moyen de stratégies fondées sur les données probantes et la culture. Elle s’emploie à améliorer les résultats de santé et de mieux-être en collaboration avec le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et d’autres partenaires. L’Accord Canada–Nation métisse prévoit un mécanisme de nation à nation fondé sur les distinctions pour faire progresser efficacement la santé et le mieux-être par l’entremise des gouvernements métis.