La relation du gouvernement avec l’industrie des combustibles fossiles doit changer : le nouveau rapport du Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques
Les subventions et mesures d’aide au secteur des combustibles fossiles doivent cesser dès maintenant selon les auteurs du Compte rendu à l’intention du Canada du Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques. Il vaudrait mieux dépenser ces plus de 14 milliards de dollars US en fonds publics pour opérer une transition juste vers une économie axée sur l’énergie propre et offrir des mesures d’aide à l’adaptation.
La crise climatique nécessite une mobilisation urgente de toute la société pour offrir aux enfants nés aujourd’hui l’environnement vivable et les systèmes de santé solides dont ils et elles auront besoin pour s’épanouir dans un monde où le climat aura changé, fait-on valoir dans le Compte rendu à l’intention du Canada publié en même temps que le dernier rapport international du Lancet.
L’édition 2021 du Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques (en anglais seulement; un résumé est disponible en français), une analyse annuelle exhaustive réalisée par 120 spécialistes de 35 institutions, suit les progrès d’indicateurs clés des impacts des changements climatiques sur la santé humaine et les efforts mondiaux pour réduire ces impacts. Le Compte rendu à l’intention du Canada [à venir] présente des recommandations pour notre pays, formulées par des spécialistes canadiens de premier rang, qui indiquent les aspects sur lesquels les dirigeants et les responsables des politiques devaient se concentrer pour préparer une saine riposte aux changements climatiques.
Publié aujourd’hui, le Compte rendu à l’intention du Canada fait ressortir trois domaines clés où le Canada peut faire pencher la balance pour réduire l’impact toujours croissant des changements climatiques sur la santé :
La relation du gouvernement avec l’industrie des combustibles fossiles doit changer
- Éliminer toutes les subventions directes et indirectes des combustibles fossiles. Réacheminer cette aide financière vers les infrastructures énergétiques saines et renouvelables au moyen d’une transition juste qui appuie les travailleurs et les communautés et qui soutient les programmes d’adaptation dans les domaines du climat et de la santé.
- Supprimer l’influence des combustibles fossiles dans les décisions stratégiques. Instituer un rapport 1:1 dans les réunions des représentants du gouvernement fédéral avec les groupes à but lucratif et non lucratif, avec des présentations et des notes publiquement accessibles, et mettre fin aux réunions à huis clos sur les politiques publiques avec des représentants de l’industrie des combustibles fossiles.
Le Canada doit se préparer et s’adapter pour sauver des vies et réduire ses coûts financiers à long terme
- Établir et financer adéquatement un nouvel organisme national ayant le pouvoir de travailler entre les silos en vue d’élaborer une stratégie nationale globale d’adaptation climatique incluant des évaluations du risque et des plans d’adaptation.
- Reconnaître que les mesures d’adaptation et d’atténuation peuvent économiser de l’argent en sauvant des vies et en améliorant la santé. Il faut donc, à tous les ordres de gouvernement et en collaboration avec les ministères de la Santé, financer, mener et promouvoir des analyses coûts-avantages pour les options stratégiques relatives aux changements climatiques, en chiffrant les impacts sur la santé.
De nombreuses mesures pourraient immédiatement améliorer la santé et réduire les émissions de gaz à effet de serre, dont l’accroissement de la verdure en milieu urbain
- Accroître et préserver les espaces verts dans les centres urbains pour atteindre un niveau de verdure élevé, en priorité dans les quartiers à faible revenu. Les municipalités urbaines doivent absolument harmoniser leurs stratégies en matière d’espaces verts et de changements climatiques, avec l’aide de la stratégie nationale globale d’adaptation climatique proposée et en collaboration avec la santé publique, les urbanistes et les associations locales.
Le Compte rendu à l’intention du Canada – rédigé par Finola Hackett, M.D.; Claudel Pétrin-Desrosiers, M.D.; Deborah McGregor, Ph. D.; Christopher Buse, Ph. D.; Courtney Howard, M.D.; Ashley Chisholm, M. Sc.; et Angela Carter, Ph. D. – est financé par l’Association médicale canadienne et l’Association canadienne de santé publique.
En résumé, le rapport de 2021 du Lancet Countdown rapporte que :
- En 2020, jusqu’à 19 % de la surface terrestre mondiale a été touchée par une sécheresse extrême au cours d’un mois donné, une valeur qui n’avait pas dépassé 13 % entre 1950 et 1999.
- Le changement climatique entraîne une augmentation de la fréquence, de l’intensité et de la durée des épisodes de sécheresse, menaçant la sécurité de l’eau, l’assainissement et la productivité alimentaire, et augmentant le risque d’incendies de forêt et d’exposition aux polluants. Les cinq années ayant connu le plus de zones touchées par une sécheresse extrême ont toutes eu lieu depuis 2015. La Corne de l’Afrique, une région ravagée par des sécheresses extrêmes récurrentes et l’insécurité alimentaire, a été l’une des zones les plus éprouvées en 2020.
- Le changement climatique menace d’accélérer l’insécurité alimentaire, qui a frappé 2 milliards de personnes en 2019. La hausse des températures raccourcit la période pendant laquelle les plantes atteignent leur maturité, ce qui se traduit par des rendements plus faibles et une pression accrue sur nos systèmes alimentaires. Le potentiel de rendement des cultures a diminué de 6 % pour le maïs, de 3 % pour le blé et de 1,8 % pour le riz, par rapport aux niveaux enregistrés entre 1981 et 2010.
- La température moyenne de surface de la mer a augmenté dans les eaux territoriales de près de 70 % (95 sur 136) des pays côtiers analysés, par rapport à la période 2003-2005. Il s’agit d’une menace croissante pour leur sécurité alimentaire d’origine marine. Dans le monde, 3,3 milliards de personnes dépendent de ressources alimentaires d’origine marine.
- En 2021, l’Organisation mondiale de la Santé a constaté qu’un peu plus de la moitié des pays ayant répondu à l’enquête mondiale sur la santé et le changement climatique (37 sur 70) avaient mis en place une stratégie nationale en matière de santé et de changement climatique, soit une proportion similaire à celle de 2018. Près des trois quarts des pays interrogés ont déclaré que des aspects financiers les empêchaient d’élaborer une telle stratégie, tandis que d’autres ont invoqué le manque de personnel qualifié, les restrictions imposées par la COVID, ainsi que l’absence de recherches et de données probantes.
- Au niveau mondial, le financement de l’adaptation au changement climatique destiné aux systèmes de santé ne représente que 0,3 % du financement total de l’adaptation au changement climatique.
CITATIONS
« Nous avons la possibilité non seulement d’investir plus efficacement, mais surtout, d’améliorer la santé et de sauver des vies – en appuyant une transition énergétique juste et une saine adaptation aux changements climatiques. »
Finola Hackett, M.D., CCMF
« Le rapport présente des solutions d’importance vitale qui peuvent être appliquées par différents ordres de gouvernement pour s’attaquer à la crise climatique. Nous devons non seulement nous adapter rapidement et efficacement, mais amorcer de toute urgence l’abandon des combustibles fossiles. »
Claudel Pétrin-Desrosiers, M.D., CCMF
« Pour aborder les iniquités structurelles et systémiques des changements climatiques chez les plus vulnérables au Canada, il faut des politiques climatiques transformatrices et justes. La protection, la conservation et la restauration de la nature dans les agglomérations urbaines sauvent des vies et représentent donc une approche d’adaptation essentielle. »
Deborah McGregor, Ph. D., Université York
« Les effets dévastateurs des changements climatiques sur la santé et les systèmes de santé sont déjà attestés. Il faut que nos gouvernements prennent dès maintenant des mesures audacieuses pour réduire les changements climatiques et en atténuer les impacts. Une pandémie, c’est assez. »
Dre Katharine Smart, présidente, Association médicale canadienne
« La crise climatique mondiale exige des changements d’orientation profonds et immédiats au Canada. Ce n’est que par une mobilisation soutenue de toute la société que nous éviterons une catastrophe climatique pour les générations futures. »
Ian Culbert, directeur général, Association canadienne de santé publique
Au sujet de l’Association médicale canadienne
L’Association médicale canadienne est la porte-parole nationale de la profession médicale. Elle vise avant tout à créer des systèmes de santé solides et accessibles, à favoriser le bien-être et la diversité dans la culture médicale et à assurer une égalité des chances pour l’ensemble de la population canadienne en matière de santé. En partenariat avec les médecins, les apprenants en médecine, les patients et d’autres parties prenantes, elle travaille à l’atteinte de ces objectifs grâce à la représentation, au partage des connaissances et aux subventions.