L’ACSP dénonce le projet de loi de l’Alberta sur le traitement involontaire comme une menace à la santé publique
L’Association canadienne de santé publique (ACSP) exprime sa profonde inquiétude face aux amendements proposés (en anglais seulement) par le gouvernement de l’Alberta à la Loi sur la santé mentale et à la création d’une ordonnance de traitement pour dépendance. Ces changements, s’ils sont adoptés, élargiraient considérablement la capacité d’imposer un traitement involontaire à des individus, y compris non seulement les personnes ayant un trouble lié à l’usage de substances, mais aussi toute personne qui consomme des substances. L’ACSP exhorte le gouvernement de l’Alberta à abandonner cette approche coercitive et inefficace et à adopter plutôt des stratégies de réduction des méfaits et des options de traitement volontaire fondées sur des données probantes.
Les données issues des juridictions ayant mis en place des politiques de traitement involontaire démontrent que ces pratiques ne réduisent pas les méfaits liés à l’usage de drogues, n’améliorent pas les résultats de santé à long terme et ne préviennent pas les décès par surdose. La déclaration de position de l’ACSP de 2025 sur la crise des drogues toxiques souligne que le traitement involontaire peut augmenter le risque de surdose mortelle après la libération, violer les droits humains et dissuader les personnes de chercher des soins de santé volontaires. De plus, le traitement forcé touche de manière disproportionnée les populations structurellement défavorisées et renforce la stigmatisation et la discrimination envers les personnes qui consomment des substances. L’accent mis par l’Alberta sur le traitement involontaire est d’autant plus incompréhensible que les personnes cherchant un traitement volontaire pour un trouble lié à l’usage de substances font face à de longues listes d’attente et à des obstacles considérables.
La portée de la législation proposée en Alberta est particulièrement alarmante. En permettant aux policiers, aux professionnel·le·s de la santé et aux membres de la famille de demander une ordonnance de traitement pour toute personne albertaine « représentant un danger pour elle-même ou pour autrui en raison de sa dépendance ou de sa consommation de substances », ce projet de loi ouvre la porte à l’inclusion d’individus ne répondant pas aux critères d’un trouble lié à l’usage de substances. Une telle approche favoriserait la criminalisation sous couvert de soins, plutôt que d’investir dans la réduction des méfaits, le traitement et les soutiens sociaux au niveau de la communauté qui ont démontré qu'ils sauvaient des vies.
Depuis 2016, des milliers d’Albertain·e·s ont perdu la vie à cause de la toxicité des opioïdes, dont 1 706 décès en 2023 seulement, ce qui représente une augmentation alarmante de 24 % par rapport à l’année précédente. Les Premières Nations ont été touchées de manière disproportionnée, représentant 20 % de tous les décès accidentels par empoisonnement aux opioïdes en Alberta entre 2016 et 2022, alors qu’elles ne constituent que 3,4 % de la population de la province. L’ACSP est particulièrement préoccupée par le fait que cette nouvelle politique puisse servir de forme de racisme systémique, en criminalisant et discriminant davantage les Premières Nations sous prétexte de traitement, au lieu d’aborder les causes profondes de l’usage de substances par le biais de solutions culturellement adaptées et dirigées par les communautés. Les politiques fondées sur la coercition ne font qu'aggraver la crise.
L’ACSP exhorte le gouvernement de l’Alberta à abandonner cette législation et à collaborer avec les expert·e·s en santé publique, les personnes qui consomment des drogues et les organismes communautaires afin de développer des politiques efficaces, éthiques et fondées sur les droits humains.