À Vancouver, des communautés à modeler avec les déterminants sociaux et environnementaux de la santé
LE PROJET
Depuis plusieurs années, l’office régional de la santé Vancouver Coastal Health (VCH) travaille sur les déterminants sociaux et environnementaux de la santé en participant à un niveau aux stratégies et aux plans qui structurent la région qu’il sert.
CONTEXTE
Nichée sur la côte Ouest de la Colombie-Britannique (C.-B.), Vancouver, la plus grande ville de la province, est une ville portuaire de 613 485 habitants. Elle fait aussi partie du district régional du Grand Vancouver, qui englobe des villes comme Richmond et North Vancouver et compte 2,5 millions d’habitants. Vancouver est l’une des villes les plus composites du Canada sur le plan ethnique : plus de la moitié de sa population parle une autre langue maternelle que l’anglais.
La Ville de Vancouver est située sur les territoires traditionnels non cédés des peuples Musqueam, Squamish et Tsleil-Waututh, qui vivent sur ces terres depuis des temps immémoriaux. VCH est établi sur les territoires traditionnels non cédés et occupés de 14 Premières Nations.
Vancouver Coastal Health (VCH) est l’organisme de santé publique responsable de la santé d’une communauté de plus de 1,25 million de personnes – près du quart de la population de la Colombie-Britannique – y compris des résidents de Vancouver, Richmond et de nombreuses villes de la côte Nord et du littoral. VCH est l’un des cinq offices régionaux de la santé de la province; c’est un organisme sans lien de dépendance régi par un conseil d’administration autonome dont les membres sont nommés par le gouvernement provincial.
« VCH est un organisme sans lien de dépendance, indique Dr Michael Schwandt, médecin-hygiéniste de Vancouver. Il est plus indépendant du gouvernement provincial que les organismes de santé publique des autres provinces, qui sont intégrés directement dans un ministère provincial, mais il assure quand même une coordination et un soutien précieux dans la province. »
LE PROCESSUS
Il y a plusieurs années, VCH a créé l’équipe Healthy Environments (HE) [Milieux sains] pour aborder les déterminants physiques et environnementaux de la santé, dont les expositions environnementales comme la pollution atmosphérique, le bruit, la chaleur et la fumée des feux de friches, et les liens entre la santé, le milieu bâti et le milieu naturel, dont l’aménagement communautaire, le logement, les systèmes de transport, les parcs et les espaces verts.
« En santé publique, nous essayons de prévenir les maladies, les blessures et les décès prématurés en abordant les facteur en amont qui touchent la santé des populations, explique Laura Chow, planificatrice en chef de l’équipe HE. Notre équipe travaille à protéger et à promouvoir la santé en contribuant à créer des communautés qui offrent des milieux sains, qui favorisent l’activité physique et la cohésion sociale et qui offrent un accès équitable aux emplois, aux services, aux parcs, aux logements et aux espaces verts. »
L’équipe Healthy Environments (HE) de base compte actuellement huit membres : une planificatrice en chef, un planificateur, deux scientifiques en santé environnementale, un responsable des changements climatiques et de la santé, deux hygiénistes du milieu et le coordonnateur du projet. L’équipe travaille étroitement avec le médecin-hygiéniste de Vancouver et offre aussi du soutien en santé environnementale à d’autres bureaux régionaux de la sphère de compétence de VCH.
L’équipe HE fait appel aux preuves et aux données sur la santé, à la recherche stratégique, à la collaboration intersectorielle et au plaidoyer pour promouvoir et appuyer les politiques et les plans susceptibles de protéger les gens, de favoriser des modes de vie sains et de réduire les iniquités en santé. Elle participe à plusieurs stratégies, plans et propositions qui auront sans doute un effet considérable sur l’aménagement communautaire, la santé environnementale et l’action pour le climat dans la région de Vancouver :
- Le plan de transport régional Transport 2050 de TransLink;
- La stratégie de croissance régionale (2050), le plan de lutte contre la pollution atmosphérique et le plan pour le climat (Climate 2050) du district régional du Grand Vancouver;
- Le plan d’urgence climatique de la Ville de Vancouver et le programme de stationnement associé;
- Le règlement du district régional du Grand Vancouver sur les émissions des moteurs diesel des engins mobiles non routiers;
- La stratégie de lutte contre la pollution atmosphérique des ports du Nord-Ouest (Northwest Ports Clean Air Strategy).
« Nous employons une approche similaire dans chaque cas tout en adaptant notre travail au scénario devant nous, précise Dr Schwandt. Nous dialoguons avec les personnes clés des organisations responsables des plans que nous voulons influencer. Nous leur expliquons que leur travail peut avoir des effets positifs ou négatifs sur la santé publique et nous leur demandons comment nous pouvons nous impliquer. Nous présentons des commentaires officiels durant les processus de consultation, puis nous exprimons notre appui aux décideurs lorsque des politiques sont à l’étude. »
Par exemple, VCH a étroitement collaboré avec TransLink, l’organisme chargé de la planification et de la gestion du transport en commun, des grandes artères, des ponts et de la planification des trajets pour le district régional du Grand Vancouver, durant l’élaboration de Transport 2050, le plan de transport régional à long terme. Tôt dans le processus, l’équipe HE a rencontré le personnel de TransLink pour l’informer des résultats cliniques positifs qui peuvent être associés à un réseau de transport en commun et de transport actif bien conçu et de la meilleure façon d’exploiter le système pour obtenir ces résultats. En collaboration avec l’équipe Population Health [Santé des populations] de VCH, l’équipe HE a passé en revue et commenté plusieurs versions préliminaires du plan diffusées pour commentaires aux parties prenantes ou au public. À la fin du processus, VCH a donné une présentation au conseil des maires pour exprimer son soutien au plan d’investissement proposé pour financer Transport 2050 et promulguer une formule de laissez-passer plus équitable et abordable pour les usagers du transport en commun.
« Nous avons abordé un vaste éventail de déterminants sociaux et environnementaux de la santé dans nos commentaires officiels et non officiels sur diverses propositions, indique Mme Chow. Avec TransLink par exemple, nous avons indiqué qu’un système de transport en commun et de transport actif bien conçu peut accroître l’activité physique, l’accès et l’équité sociale tout en réduisant la pollution atmosphérique, les gaz à effet de serre (GES) et les blessures et décès liés aux véhicules. Dans d’autres processus, comme ceux des plans d’action pour le climat, nous avons plaidé en faveur de politiques d’accès équitable aux parcs et au couvert végétal et arboré afin d’améliorer la santé mentale et physique des populations vulnérables et d’atténuer les répercussions de la chaleur extrême dans les quartiers à risque élevé. »
Lorsque l’équipe HE s’est prononcée en faveur du programme de stationnement proposé par la Ville de Vancouver pour financer certains éléments du plan d’urgence climatique récemment approuvé par la Ville, elle a cité l’adaptation aux changements climatiques, la réduction des GES et l’équité en santé.
« Dans une lettre officielle au conseil municipal, nous avons soutenu que le programme proposé aiderait la Ville à atteindre ses objectifs climatiques tout en créant la possibilité de plusieurs avantages conjoints pour la santé, précise Dr Schwandt. En intégrant un “redevance pollution” dans le coût des permis de stationnement des véhicules particulièrement chers et polluants, avons-nous fait valoir, le programme encouragerait la transition vers des véhicules moins polluants et générerait des recettes pour financer le transport actif et un couvert arboré élargi; par ailleurs, plusieurs des mesures incluses dans la proposition éviteraient les effets nuisibles que les coûts des permis pourraient avoir sur l’équité sociale. »
L’équipe HE a aussi tenu des consultations étroites avec BC Housing, la Ville de Vancouver et le district régional du Grand Vancouver sur la conception des nouveaux bâtiments et l’adaptation des bâtiments existants pour qu’ils puissent supporter les changements climatiques, favoriser l’équité en santé et réduire les polluants atmosphériques et les GES.
« Dans nos discussions informelles et nos présentations officielles, nous avançons l’idée que les nouveaux bâtiments devraient réduire, et idéalement éliminer, la pollution atmosphérique et les émissions de GES. Nous plaidons en faveur de technologies comme les pompes à chaleur et les systèmes d’épuration de l’air pour protéger les gens contre la chaleur extrême et la fumée des feux de friches. Nous avons souligné que c’est particulièrement important dans les logements locatifs pour les populations à faible revenu, indique Emily Peterson, l’une des scientifiques en santé environnementale de l’équipe HE. Le nouvel arrêté municipal de Vancouver sur les normes de construction prévoit des mesures de protection supplémentaires contre la chaleur extrême et la fumée des feux de friches d’ici 2025 pour les complexes d’habitation tout en imposant d’importantes exigences de réduction des émissions de GES. »
RÉSULTATS OBTENUS
L’équipe HE a tissé des relations de travail solides et efficaces avec le personnel de toute la région. Elle travaille avec 14 administrations locales, cinq districts régionaux, deux administrations du transport et beaucoup d’autres partenaires et organismes non gouvernementaux.
Elle a fait intégrer des justifications, des preuves et des politiques de protection de la santé dans plusieurs stratégies et plans charnières qui contribueront à modeler l’élaboration de communautés propices à la santé.
L’équipe a contribué à faire en sorte que la santé des populations, l’équité en santé et les changements climatiques soient pris en compte dans plusieurs politiques et plans essentiels, dont le plan de transport régional, les plans d’action pour le climat de la Ville de Vancouver et du district régional du Grand Vancouver, la stratégie de lutte contre la pollution atmosphérique du port de Vancouver et l’arrêté municipal révisé sur les normes de construction de la Ville de Vancouver.
LEÇONS RETENUES
« Avec certains organismes, nous avons des réunions périodiques pour faire le point, indique Mme Chow. Ces réunions comportent parfois un échange informel d’idées sur des plans ou stratégies qui ne sont même pas toujours sur papier. D’autres fois, nous entendons parler de précieuses possibilités de collaboration ou d’action. »
Voici les leçons que l’équipe HE de VCH a retenues de son expérience :
- Il est essentiel de cultiver des relations avec les responsables des plans qui ont des effets importants sur la santé publique. La confiance doit se bâtir à la faveur d’échanges officiels et informels.
- Il importe de « rejoindre les gens là où ils se trouvent »; de se rappeler que la santé publique n’a pas d’autorité directe dans beaucoup de ces situations. Souvent, le personnel doit rallier les gens à sa cause avec des arguments convaincants, des preuves solides et une bonne connaissance de la communauté pour gagner l’appui du public et des décideurs.
- Une idée qui n’est pas acceptée ou financée dans l’immédiat peut faire son chemin quand la situation change. Par exemple, des idées qui n’avaient pas obtenu de soutien avant le dôme de chaleur qui a frappé la Colombie-Britannique en 2021 sont maintenant appuyées par des partenaires de plusieurs secteurs.
« Nous devons mieux surveiller le paysage politique pour savoir comment être plus efficaces sur le plan stratégique, ajoute Dr Schwandt. Avec le programme de stationnement associé au plan d’urgence climatique, par exemple, certaines personnes s’étaient opposées à la proposition sur les permis en faisant valoir qu’elle était inéquitable, alors qu’il était clair pour nous que globalement, elle aurait des effets bénéfiques sur le plan de l’équité en santé, de la santé de la population et de l’empreinte écologique de la ville. En anticipant les réserves qui pourraient être exprimées face aux propositions novatrices et en présentant des preuves pertinentes, nous serons mieux en mesure de promulguer avec succès des politiques publiques favorables à la santé. »
Préparé par Kim Perrotta, M.Sc.S., directrice administrative, CHASE
Date de modification : 8 janvier 2023